MARIE-HELENE PIWNIK
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On connaît en France, sous le titre Livre de l'Intranquillité (Éditions Christian Bourgois, première édition en 1988 et 1992, dernière en date en 2011), la belle traduction par Françoise Laye du Livro do Desassossego, de Fernando Pessoa, qui s'appuie sur l'organisation par Richard Zenith des différents fragments qui le composent. Teresa Rita Lopes, professeur des universités émérite à l'Université Nouvelle de Lisbonne, a beaucoup publié sur Pessoa, dont elle est une spécialiste reconnue. En tant que directrice de l'équipe de Zenith, elle a consacré une grande partie de sa vie de chercheuse à l'ensemble des manuscrits de cette oeuvre maîtresse de Fernando Pessoa, et c'est ce travail de longue haleine qui l'a conduite à repenser de fond en comble leur distribution.
S'appuyant sur l'examen autant que faire se peut exhaustif des manuscrits du Livro do Desassossego, elle en propose aujourd'hui une version aussi audacieuse que convaincante, lui assignant trois auteurs parfaitement différenciés, se partageant un Livre qui se décline en trois parties nettement définies : Fernando Pessoa déléguant Vicente Guedes pour le représenter, le Baron de Teive, jamais intégré dans le Livro malgré la volonté expresse de Pessoa, et Bernardo Soares. Leurs voix respectives sont ainsi mises en scène dans une impeccable cohérence et complémentarité, qui confère à ce grand texte une étonnante unité dans sa diversité. Teresa Rita Lopes offre ainsi une structure interne qui fait de cet ensemble, selon elle, le « livre de la vie » de Pessoa, du poète auteur de Pauis qu'il fut dans sa jeunesse jusqu'au dernier Soares, qui dit appartenir à la lignée romantique. Elle va plus loin en affirmant que l'on doit assister séparément et sans les confondre aux monologues de ces trois auteurs, en imaginer l'interaction, et étendre ce dialogue à Fernando Pessoa lui-même.
Outre l'entrée en scène du Baron de Teive, ce qui implique une trentaine de fragments jamais inclus précédemment, d'autres inédits et déplacements d'attribution figurent dans l'ensemble composé par Teresa Rita Lopes. Une nouvelle traduction du Livro do Desassossego s'impose donc, que justifie cette conception novatrice. Le lecteur français redécouvrira ainsi, dans la version aussi révolutionnaire que documentée de Teresa Rita Lopes, un des plus grands textes du XX e siècle.
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Jacinto, dandy et riche héritier d'une famille de notable portugais, vit à Paris depuis tout petit. Fasciné par la ville lumière, son mouvement et sa modernité, il collectionne dans sa résidence du 202, Champs-Élysées, toutes sortes d'inventions propres à l'époque. Des objets incongrus représentants selon lui le summum du raffinement, la haute civilisation et donc la condition à son bonheur ! Lampes électriques en tout genre, brumisateurs, tissus précieux, bibliothèque au quelque 30 000 milles volumes... La maison déborde de cette civilisation !
Zé Fernandes, jeune homme originaire d'un petit village du nord du Portugal s'installe chez son ami Jacinto pour suivre ses études à Paris. Initié aux plaisirs de la société moderne, il découvre la ville lumière, déambule dans ses rues y rencontre ses groupes d'intellectuels et d'artistes.
La fascination de Jacinto pour la technique, sa croyance illimitée dans le progrès est insatiable et le mènera bientôt à la dépression. Son jeune ami décide pour l'aider de le faire revenir aux plaisirs d'une vie frugale et simple. Il l'incite à quitter Paris pour rejoindre son village du nord du Portugal. Nous entrons alors dans la deuxième partie du roman.
L'exubérance et la superficialité des plaisirs parisiens laissent place à la simplicité et à l'apaisement de la campagne. Ce voyage n'est pas sans péripéties mais le retour aux sources sera fructueux pour nos deux compères.
202, Champs-Élysées, titre posthume d'Eça de Queiroz, propose une savoureuse satire de la modernité. Dans ce roman incisif et enjoué les dérives du progrès sont dénoncées. La vacuité des plaisirs urbains, l'accumulation des objets et de nouvelles techniques prophétisent la décadence d'une société en perte de repères. L'auteur que l'on ne présente plus, oppose deux mondes en utilisant sa verve ironique tant appréciée. À la ville prétentieuse il oppose un monde simple, la campagne, où le plaisir y est pur. Somme toute, une thématique tout à fait contemporaine !
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«Voilà une façon de perpétuer les idées d'un homme que j'apprécie sans réserve : publier sa correspondance ! Il y a d'emblée cet immense avantage : que la valeur des idées n'est pas décidée par celui qui les a conçues, mais par un groupe d'amis et de critiques, d'autant plus libres et plus exigeants dans leur jugement qu'il s'agit d'un mort dont ils veulent montrer au monde les aspects les plus forts et les plus lumineux.»Voilà donc le projet d'Eça de Queiroz : dresser le portrait d'un homme, Fradique Mendes, visionnaire, d'une grande érudition, un brin provocateur et attachant qui vit entre Paris et Lisbonne où il côtoie les intellectuels et artistes de son temps : Baudelaire, Leconte de Lisle, Théophile Gautier ... Fradique Mendes est un dandy dont la biographie, prétendument écrite après sa mort par son meilleur ami, introduit le livre. Suivent 24 lettres qui sont adressées à des personnages réels, contemporains et amis d'Eça de Queiroz lui-même ainsi qu'à d'autres personnages fictifs... Elles présentent une grande diversité de thèmes : philosophiques, politiques, religieux, amoureux ou encore des sujets plus légers comme la dissertation sur l'art de s'habiller... On y lit des portraits hilarants de personnages « types » à la façon de Balzac. D'autres de ces lettres sont des moments d'anthologie comme l'arrivée nocturne à la gare de Lisbonne déserte... La société bourgeoise portugaise y prend aussi pour son grade. Publié à titre posthume, Fradique Mendes est indubitablement un chef-d'oeuvre : Eça de Queiroz sait capter et révéler à merveille l'air du temps, cette fois-ci, en proposant une sorte de roman épistolaire qui brouille les frontières du genre et par conséquent celles de la réalité ... Qui se cache derrière Fradique ? Eça lui-même ? Peut-on parler d'un premier hétéronyme ? Le côté expérimental de l'oeuvre lui donne un côté indéniablement moderne. D'une grande intelligence, un délice de lecture, fin et drôle !
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La folie rode dans la cité de Jérusalem. Une nuit de juin, six ombres errent dans les rues menaçantes. Un enfant parti à la recherche de son père, une jeune femme schizophrène, un ancien militaire angoissé, une prostituée défraîchie... Ces silhouettes vont se croiser et se rencontrer dans un drame complexe, où chacun cherche à assouvir une pulsion ou bien réparer une souffrance.
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Edmundo Galeano a 25 ans, il a parcouru le monde, participé à une mission humanitaire et est revenu dans la maison paternelle avec une main estropiée. Il est revenu pour écrire et passe ses jours à essayer d'élaborer littérairement son témoignage. Un roman qui expliquera le monde et l'empêchera de courir à sa perte.
Sa famille passe par une série de vicissitudes économiques qui mettent en danger la maison familiale, refuge de tous. Il y a l'aîné qui a mis sur pied un projet destiné à sauver la fortune de la famille en transformant deux bateaux, mais l'autorisation de l'administration se fait attendre depuis des années. Il a tenté de conjurer le sort et attend une bonne nouvelle. Un cadet avocat et dandy dont les affaires déclinent et qui essaie de sauver son cheval du naufrage de sa fortune. Le frère suivant qui réhabilite des immeubles vétustes pour les louer à des clandestins et est amoureux d'une belle Estonienne enceinte de lui et qui a besoin de place pour le bébé. La jeune soeur divorcée, avec un enfant de 8 ans fasciné par la baleine 52 Hertz, un enfant qui ne ressemble pas à son père mais au grand amour de sa mère. Et la tante Titi qui a sacrifié sa vie pour élever ses neveux et dont la vieillesse et la présence sont maintenant encombrantes. Lorsque le père de famille, armateur ruiné, baisse les bras, tout se précipite et chacun est confronté à ses échecs et à ses culpabilités. Edmundo prend alors conscience que ses aventures lointaines et son projet littéraire sont en relation directe avec les batailles privées qui se déroulent autour de lui.
Ce superbe roman choral nous montre, avec tendresse et ironie pour l'apprenti écrivain, le processus de la création littéraire, ses embûches, ce que représente le travail d'écriture. Il nous montre aussi comment les vies quotidiennes dépendent de ce qui se passe bien loin d'elles-mêmes et des décisions prises à d'autres échelles. Lídia Jorge, qui a toujours pratiqué un « réalisme aux portes ouvertes », nous trouble en introduisant des éléments fantastiques et irrationnels dans ses personnages et nous montre que la passion amoureuse va plus loin qu'on ne pourrait le penser. Elle montre le plus proche pour atteindre l'universel.
Après avoir exploré l'Histoire et les façons d'en rendre compte, Lídia Jorge revient à l'exploration des actions et des sentiments qui constituent les vies ordinaires et les abîmes qu'elles recouvrent. Un grand roman écrit par une très grande romancière.
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Je pense que c'est ça qui lui est arrivé. Il s'est perdu au milieu des lettres, des titres, perdu au milieu des histoires qui habitaient sa tête. Parce que nous sommes tous faits d'histoires, pas d'adé-ènes et de codes génétiques, ni de chair, muscles, peau et cerveaux.
Elias Bonfim, douze ans, n'a jamais connu son père : ce modeste fonctionnaire amateur de littérature a définitivement disparu des radars après s'être engouffré un bel après-midi dans L'île du docteur Moreau de H. G. Wells. Taraudé par cette insolite fugue paternelle, le jeune garçon part à sa recherche... À travers ce bref roman au tempo endiablé, Afonso Cruz nous fait partager ses aventures loufoques, passant de Lao-tseu et Ray Bradbury au héros de Dostoïevski, Raskolnikov, et à d'autres personnages encore, dans un périple qui est aussi un merveilleux hommage à la littérature, aux livres et à la lecture.
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Jésus-Christ buvait de la bière dépayse le lecteur en le plongeant d'emblée dans un village rural de l'Alentejo, au Portugal. Au premier plan, Rosa, quinze ans, une adolescente à l'érotisme brut. Elle rêve aux héros de ses romans policiers et westerns, et suce comme des bonbons des cailloux qui lui rappellent des moments plus ou moins heureux de sa jeune existence. Son grand-père s'est jeté dans un puits, sa grand-mère devenue veuve, Antónia, s'est emmurée dans sa vieillesse, sa mère, Isabel, archéologue, a épousé un paysan de condition inférieure, João Lucas Marcos Mateus, puis, vite lassée de son mari, est tombée dans l'alcoolisme et la nymphomanie, devenant pour Rosa l'incarnation de la Sainte Vierge avant de disparaître définitivement.
Se sentant proche de la mort, Antónia a un rêve qu'elle confie à sa petite-fille : se rendre en Terre sainte ! Un désir qui sera bien étrangement exaucé par le petit cercle de Miss Whittemore, la millionnaire anglaise qui a racheté le village. Celle-ci dort dans le squelette d'une baleine et y héberge un sage hindou, un sorcier yoruba africain et le professeur Borja, un vieil illuminé. N'ont-ils pas tous décidé de déguiser ce modeste village en Jérusalem, organisant même un repas de Cène où l'on boira. de la bière ? Car - nombreux sont ceux qui l'ignorent - c'était la boisson de prédilection de Jésus-Christ.
Un livre à la fois bouleversant et désopilant, semé d'histoires gigognes, qu'on lit à bride abattue, immergé dans un monde rural baroque où se télescopent - pour le plus grand bonheur d'un lectorat varié - personnages frustes et érudits excentriques.
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La correspondance de Fradique Mendes
Eça de Queiroz
- La difference
- Litterature Etrangere
- 6 Février 2014
- 9782729120757
Ce roman est un des derniers romans inédits de Eça.
Le personnage de Fradique, déjà ébauché dans Le Mystère de la route de Sintra, est un dandy pittoresque, protagoniste de cette Correspondance, dont la biographie, prétendument écrite après sa mort par son meilleur ami, introduit le livre. Certains chapitres parurent sous forme de feuilleton simultanément au Brésil et au Portugal et plusieurs lettres apparurent comme chroniques signées Eça de Queiroz dans la Gazeta de Notícias en 1892 et en 1897, dans la Revista Moderna, publiée à Paris. C'est dire combien se superposent Fradique et son créateur.
Ses correspondants, tous fictifs et pourtant si réels, sont Clara dont il est épris et à qui il écrit des lettres passionnées, Madame de Jouarre, un ingénieur chargé de construire la voie ferrée Jaffa-Jérusalem, un poète qu'il met en garde contre le « Décadisme », et des personnages « types », croqués d'une manière hilarante, tels le Père Salgueiro ou le député Pacheco.
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Visages de l'Inde ; et autres rêves
Urbano Tavares Rodrigues
- La difference
- Litterature Etrangere
- 8 Octobre 2009
- 9782729118181
Je suis venu ici retrouver l'arôme piquant de toutes les fleurs et de toutes les saveurs, et le croassement des corbeaux de l'antique Goa, le fantôme des églises reconstruites, et les processions zébrées de vert et d'or, la respiration des puits qui attire la mort, les buffles somnambules qui avancent lentement dans les rizières, lointains émissaires du rêve d'un de ces demi-dieux guerriers des sagas du Sud de l'Inde. dans l'éclair bleu de cette fin d'étape, éblouissant écran, je trouve tes lèvres de corail et d'éternel sourire, toujours si fraîches.
J'y puise à longs traits émus la gloire de la vie, blotti dans cette chaleur qui enveloppe la terre et dit adieu au murmure.
Chants, en terre indienne, à la femme aimée. Un hommage aux villes indiennes. Chacune des villes traversées inspire un texte au poète. Une poésie en prose, sensuelle et lumineuse.
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Recueilli par sa soeur après avoir subi une agression, Gustavo, cinéaste sexagénaire en fin de course, rumine ses innombrables blessures intérieures... À travers cette introspection burlesque, Mário de Carvalho met en scène les discordances qui dérèglent les relations entre les hommes et les femmes : l'inépuisable Désamour, en somme...
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C'est toute sa vie passée et présente qu'évoque le narrateur, un médecin qui est aussi caricaturiste, et peintre à ses heures perdues d'un tableau qui ne sera jamais achevé. Réfugié dans le souvenir fugace de Barbara, image tentatrice et aléatoire de l'amour, il affronte la réalité paisible de son mariage avec Ângela et sa furieuse perfection, et l'étrange destin de leurs enfants.L'écriture baroque et tumultueuse du roman traduit avec force les contradictions intimes du personnage, déchiré entre le bien et le mal, la raison et le fantasme, la vérité et l'illusion, tandis qu'il considère avec ironie l'envers de notre réalité quotidienne, la montée des sectes, le déferlement des exclus ou le règne du monstrueux.Roman fascinant, envoûtant, que ce dernier livre de Vergilio Ferreira, où seule la création, en particulier artistique, abolit les contraires. Jeunesse et vieillesse, laideur et beauté, sens et non-sens sont ainsi transcendés, comme la vie et la mort, au nom du désir inassouvi.
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Deux trentenaires lisboètes, sur le point de se séparer, se livrent à un inventaire méthodique et courtois de leurs biens respectifs. Inventaire qui achoppe très vite sur leur tortue domestique. À travers cette trame cocasse, Marió de Carvalho épingle avec brio des affects conjugaux dangereusement volatiles et pointe de façon irrésistible les ridicules de notre prétendue modernité.
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Fantaisie pour deux colonels et une piscine
Mario De Carvalho
- Christian bourgois
- Litterature Etrangere
- 4 Octobre 2007
- 9782267019384
Sur fond de post-Révolution des Oeillets, deux couples improbables nous entraînent de Lisbonne à l'Alentejo, dessinant ainsi un ballet aussi cruel qu'hilarant. Sur un ton burlesque et anecdotique, ce récit brosse un portrait satirique et pessimiste du Portugal contemporain. La décrépitude de ces deux colonels en retraite et de leurs épouses emblématise une décadence globale qui ne touche d'ailleurs pas seulement le Finisterrae européen. La piscine qu'ils construisent dans une région subdésertique pour ne pas s'y baigner constitue dès lors le refuge d'un passé sans cesse évoqué et regretté, mais aussi d'un présent lourd de compromissions qu'effraient les excès d'une modernité prise pour cible par un narrateur ludique et incisif.
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Vie et oeuvre d'Eça de Queiroz
A Campos Matos
- La difference
- Litterature Etrangere
- 4 Mars 2010
- 9782729118426
Après avoir publié, depuis 1985, l'essentiel de l'oeuvre de l'auteur portugais Eça de Queiroz (1845-1900), La Différence propose aujourd'hui une biographie de celui que Borges considérait comme " un des plus grands écrivains de tous les temps ".
Fils naturel tardivement reconnu et fervent admirateur de Garibaldi et de la Commune de Paris, il fera de la critique sociale un de ses fers de lance. Sa carrière de diplomate le conduit en Angleterre et en France où il est consul à Paris de 1888 jusqu'à sa mort, ce qui lui donne l'occasion de rencontrer Zola et d'assister au scandale de l'Affaire Dreyfus.
Grand admirateur de Flaubert, il est un portraitiste cinglant des travers de ses contemporains et excelle dans tous les genres : romans, nouvelles, contes, chroniques...
Première biographie disponible en français.
Encore inédit en langue portugaise, ce texte prend en compte les dernières découvertes sur la vie tumultueuse de Eça de Queiroz.
Eça de Queiroz : " On dit aussi de lui qu'il fut le Flaubert, non, le Balzac, non, le Zola portugais. [...] De fait à la lecture de Eça de Queiroz, on mesure vite sa stature " (Rachel Grandmangin, Le Magazine littéraire).
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Paru en 1991, 202, Champs-Élysées est un des derniers chefs-d'oeuvre de Eça de Queiroz. Il parut au Portugal un an après sa mort, en 1901, sous le titre A Cidade e as serras (La Ville et les montagnes).
Raconté par Zé Fernandes, ami du héros, Jacinto, le récit se déploie entre la « civilisation », incarnée par Paris, la ville Lumière où est situé l'hôtel particulier du 202, Champs-Élysées, où demeure Jacinto, et la « barbarie », personnifiée par le village de Tormès, que constituent les montagnes du Sud du Portugal. Mais très vite, Jacinto se lasse des innovations de la prétendue civilisation (de son graphophone, son théâtrophone, son conférençophone, son monte-plats, son numéroteur de pages...) et autres gadgets sortis du Catalogue de l'Exposition universelle et redécouvre « la vraie vie » de la campagne, les charmes, la beauté d'une existence simple et naturelle. Le paradis est devenu enfer et l'enfer paradis.
Prémonitoire, féroce et d'une drôlerie constante, le roman est une charge d'une modernité stupéfiante sur le factice et le dérisoire d'un progrès détourné de sa mission et un hymne aux vertus de la province que ne dénieraient pas les écologistes contemporains.
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Tu ne tueras point
Urbano Tavares Rodrigues
- La difference
- Litterature Etrangere
- 21 Août 2001
- 9782729113629
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En réponse aux Lettres à la fiancée de Fernando Pessoa, voici un choix de lettres écrites par la fiancée, Ofélia Queiroz, au poète, publiées pour la première fois au Portugal tout récemment et inédites à ce jour en français.
" Cher Monsieur, votre présence dans l'entreprise Félix, Valladas & Freitas, Lda, m'est extrêmement agréable, et je me permets de vous dire que c'est à cause d'elle que je ne me trouve pas dans une autre entreprise où je gagnerais sûrement plus, mais... Votre présence dans l'entreprise Félix, Valladas & Freitas m'est très chère, car je suis très attirée par vous... " Ainsi commence la relation amoureuse entre Fernando Pessoa et Ofélia Queiroz, au début de l'année 1920.
Ofélia est alors une jeune femme de dix-neuf an et travaille dans la même entreprise que le poète, de onze ans son aîné. Une série de longues. " Aujourd'hui c'était vraiment bouche sucrée... n'est-ce pas, mon amour ? Savez-vous que la moustache de mon Ibis a fait des chatouilles à la bouche de son Ibis? Mais quelle grande surprise ! Bébé a énormément aimé et il est déjà tout plein de nostalgie... " Mon désir est de dévorer mon Ibis chéri.
Venez là, Nininho, tout près de moi! je vais aller vous chercher sans attendre, je vais vous voler et vous mettre dans une très jolie petite boîte doublée de satin jaune, toute parfumée, et de temps en temps, j'ouvrirai la boîte, je vous donnerai des tas de baisers, puis je refermerai la boîte, mes bisous vous contenteront, Nininho, vous ne mourrez jamais, vous serez toujours à moi rien qu'à moi, et je vous transporterai toujours avec moi.
"
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Pension des mondes perdus
Pedro Rosa-Mendes
- Metailie
- Bibliotheque Portugaise
- 16 Avril 2015
- 9791022601696
Timor oriental, 1999. Alor, un jeune architecte indonésien, arrive à Díli chargé de concevoir une maison pour le leader indépendantiste du Timor. Il s'installe dans la Pension du Monde Perdu, où les chambres portent des noms de massacres. Dans les mois qui précèdent le vote pour l'indépendance, il va vivre un crescendo de violence, être manipulé, rencontrer une princesse, un moine soldat, un évêque, un agent de Jakarta et le Généralissime, alias La Relique, le premier chef de la nation, survivant d'un bombardement, caché dans une grotte dans la montagne. Alor représente l'élu, le sauveur envoyé par le destin. Mais Dieu «est un crocodile étranger», dit-on à Díli. Dans l'euphorie du référendum, Jakarta lance une opération, Alor disparaît dans le chaos, et on ne retrouve qu'une tête coupée dans une boîte. La Suède envoie un évêque pour mener l'enquête. Ce livre réunit toutes les pièces et les rapports de sa mission. Ce roman magnifique est un requiem pour les mondes perdus des restes de l'Empire portugais. Il est écrit du point de vue des colonisés. Nul ne pouvait mieux parler du Timor que le journaliste qui y a été correspondant dans une des périodes sanglantes de son passé récent.
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Les Berbères ont franchi les colonnes d'Hercule et se répandent dans la plaine d'Algarve.
Comment Lucius Quincius, duumvir sous Marc-Aurèle à Tarcisis, au fin fond de la Lusitanie romaine, arrêtera-t-il l'envahisseur ? La tâche ne lui sera pas aisée : il est en conflit avec la curie, hostile à la secte du poisson, alors que lui-même est inconsciemment épris d'une jeune patricienne convertie ; il se heurte à l'ambition d'affranchis dont il ne pourra déjouer les manoeuvres, à l'hypocrisie d'informateurs qui haïssent les chrétiens ; et il a une haute conception des devoirs d'un Romain, comme l'amitié, la justice, le contrôle de soi.
Saura-t-il rester équanime devant la trahison ? Mário de Carvalho nous entraîne dans une fable dont la reconstruction historique est minutieuse alors que tout y est fictif. La réflexion sous-jacente sur le pouvoir et ses aléas, ou sur la subtilité des rapports entre les êtres, sont autant de signes d'intelligence au lecteur, séduit par l'écriture ironique, incisive, étincelante d'un des meilleurs prosateurs européens actuels.