Ne jamais sortir de chez soi en pantoufles avec ses clefs à l'intérieur ! Ou alors être prêt à l'aventure urbaine et sociale. Le héros de cette épopée urbaine va éprouver le pouvoir de ses charentaises et de quelle manière sa vie, pourtant si banale, peut en être changée. Face à ses collègues de travail, sa famille, ses amis, les forces de l'ordre, voire la confrérie des farfelus, il se lance pendant plusieurs jours dans un combat inattendu pour imposer sa si tranquille façon de marcher et de regarder les gens, à hauteur de chaussettes. Ce numéro de funambule s'achèvera devant un spectacle de Guignol, joliment.
Les lecteurs de Franz Bartelt connaissent sa prédilection pour les personnages bavards adeptes de théories, de divagations, parfois mais pas toujours à jeun.
En quinze monologues, il propose autant de figures qui font de la mauvaise foi, de la mauvaise humeur ou de la mauvaise haleine un art majeur. Du critique de théâtre persuadé que sa plume est « une arme de destruction massive » qui aurait mérité une bonne guerre, à l'adepte de la politique de la chaise vide, en passant par un surdoué magnifiquement abruti, voilà une galerie qui permet à l'auteur du Jardin du bossu de donner toute la mesure de son inspiration puisée au café du coin ou pas tellement plus loin. Et si encore ce n'était que drôle...
Dans la merveilleuse traduction du «Prince des humoristes», Gabriel de Lautrec, voici presque dix contes du précurseur de l'humour américain, celui qui a inventé un ton, un style, donné ses lettres de noblesse à la langue populaire, Mark Twain, génie pince sans rire qui nous fait rire plus de cent ans après sa mort.
«Enfiler des détails incongrus et absurdes sans but, et ne pas avoir l'air de s'apercevoir que ce sont des absurdités, telle est la base de l'art américain», écrivait-il, telle est sa base surtout lui qui enchaîne avec une vivacité primesautière les histoires les plus burlesques sur le ton le plus sérieux. La vie est exaspérante, c'est une bonne raison d'en rire. L'échec est bien plus garanti que le succès, autant s'en gausser, pour se hausser...
« Je pensais souvent à ce cinéaste japonais, Ozu, qui avait fait graver ces simples mots sur sa tombe : « Néant ». Moi aussi je me promenais avec une telle épitaphe, mais de mon vivant. » Adolphe Marlaud habite un appartement avec vue sur le cimetière qui domine la rue Froidevaux, une de ces rues où « on meurt lentement, à petit feu, à petits pas, de chagrin et d'ennui. » N'ayant réussi à n'être ni fantôme, ni homme invisible, en exil, cet étrange voyageur d'hiver s'est fixé une ligne de conduite : « vivre le moins possible pour souffrir le moins possible. » C'est sans compter sur Madame C., sa concierge, qui guette amoureusement son passage du haut de ses deux mètres pour le contraindre à des actes que la pudeur réprouve.
Pris parmi la série des monologues tout juste édité, voici un sommet du genre, un texte qui a le grand mérite en ces temps de bouleversements électoraux de nous rappeler au principal, à l'évidence, au bon vieux temps, celui qui nous manque tant, « parce qu'avant on avait le droit de boire tout ce qu'on voulait, c'était normal, c'était culturel, et tout allait bien, on était heureux, on était même joyeux, entreprenants, on n'avait peur de rien, on se lançait sans réfléchir dans des projets qu'on n'aurait même pas osé imaginer à jeun. » Un Bartelt de poche pour faire passer le message que l'Ardennais n'est pas simplement un écrivain unique, c'est avant tout un grand écrivain.
Enfant, Jean-Pierre Ohl s'est cru responsable de la mort de son idole Enid Blyton, la radio ayant annoncé le disparition de la créatrice de Oui-Oui alors qu'il achevait un de ses livres. C'est sans doute pour conjurer ce traumatisme qu'il nous offre aujourd'hui un roman alambiqué et ambré comme il sait les imaginer, nous entraînant à la suite d'une improbable brochette d'enquêteurs penchés sur l'identité du "lectueur", un vengeur qui se charge de faire payer aux "grands" auteurs leurs viles actions. On en retrouve en effet quelques uns victimes de lettres qui semblent les terrasser. Placée entre un libraire digne de Dickens et porté sur la bouteille et un commissaire en retraite qui se sait condamné, une jeune étudiante va ressusciter une époque révolue, celle où l'on croyait aux livres...
Sous la patronage du Zeno de Svevo obsédé par sa tabagie, Raphaël Rupert nous raconte la vie d'Hector Schmidt au prisme de la migraine (classée 20° maladie au monde par l'OMS...) qui le poursuit et l'accompagne depuis l'enfance. Maladie par excellence des écrivains ? s'interroge le narrateur qui n'est jamais en mal de référence. Hugo, Balzac, Maupassant, Sand, Stendhal, Flaubert, Gide ont tous contribué à l'anthologie des grands migraineux de talent. On en parle, on l'étudie mais on ne la vainc jamais. Alors une fois que l'on a tout dit, c'est peut-être la littérature qui peut essayer d'éclairer cette part d'ombre. Dans ses pages, le héros à la tête hachée, après avoir tenté la psychiatrie, interroge, subit, raconte, tente des expériences qui vont le mener dans des lieux inattendus.
Parue en 1935, cette dystopie britannique fait partie des plus belles et des plus intrigantes réussites du genre. Elle immerge le lecteur dans les tréfonds d'une civilisation descendante des Romains qui s'est installée sous la terre, au bord d'une vaste mer intérieure, entourée d'angoissantes ténèbres. Le héros qui découvre cette terre sous la terre poursuit un vieux fantasme familial persuadé de l'existence de ce monde. Mais nul n'a pu le prouver jusqu'à l'aventure d'un intrépide qui va entreprendre de raconter dans le détail le monde qui s'est développé à l'abri de la surface, une terre peuplée d'animaux et de plantes fantastiques où l'humain a créé une société impitoyable dont toute liberté est bannie, faisant de l'individu un serviteur absolu de l'État. La société totalitaire qu'il décrit est régie par le contrôle télépathique des esprits. Le roman combine aux éléments d'un récit de «race perdue» les craintes de contrôle totalitaire dans une époque où le fascisme embrase les esprits en Europe.
Fable dont la date de parution originale n'a rien d'anodin, La terre sous l'Angleterre mêle le texte d'aventure à la réflexion dystopique la plus inquiétante.
Ivan Péault débarque avec fracas en littérature avec ce premier recueil de treize nouvelles qui signale un talent évident, une dilection pour les situations tangentes et un goût pour la provocation parfaitement contrôlée. On en jugera avec celle ouvrant le livre qui nous fait partager le quotidien d'un charmant couple de petits vieux qui ont promis que rien ne les séparerait sinon la mort qu'ils rejoindraient ensemble : une magnifique intention qui va se heurter à la furieuse et inavouable envie de vivre de l'un des deux quand l'autre se voit attaqué par un cancer malvenu... Avec des titres comme Autobio d'un Bic ou Gastroman, on comprend qu'Ivan Péault aime mettre les pieds dans le plat et que sa viande se mange froide, bien froide.
« Ah ! L'horreur sinistre des braves gens !... » Tandis qu'on se déchaîne autour de l'affaire Dreyfus, Octave Mirbeau, son plus ardent défenseur, est secoué de dégoût. Les Mémoires de mon ami (1899) vont lui offrir l'occasion, avec ce génie qui lui est propre, de régler son compte « à cette fiction abominable et terrifiante qu'on appelle : la Société ! » Court roman qui rejette les formes convenues, ce texte noir où perce une drôlerie désespérée, met en scène la figure d'un minable passé maître dans l'art du détachement, étranger au poids du monde et à lui-même.
Face au réel, grotesque ou monstrueux, Mirbeau impose sa cruauté et son théâtre de l'absurde, quarante ans avant l'apparition d'un certain Meursault...
Jean-Marc Aubert a considéré que le moment était venu pour lui qui avait toujours nourri ses oeuvres de sa propre vie en la transformant en fiction, de se lancer dans le portrait de son entourage en considérant ces figures comme des insectes dont on peut observer les comportements. Son désir de « rentrer dans la peau des cobras et des grillons », de « penser comme un buffle, de ressentir comme la loutre et le criquet et humer la savane comme le lion ou l'antilope » l'ont poussé à essayer de limiter son vocabulaire et sa pensée, recherchant les sensations primitives, celles de la faim, de la nécessité de tuer, de se reproduire.
Entomologiste impitoyable, il règle ainsi ses comptes avec son ascendance et sa descendance, ses proches, sans oublier de s'en prendre à lui-même.
Le « prince des humoristes » a fait du calembour énorme et désarmant sa marque de fabrique. Les saynètes réunies ici, choisies dans ses meilleurs recueils, témoignent d'une manière de procéder qui lui est propre car c'est la plupart du temps un bon mot (souvent tiré par les cheveux) qui va conditionner l'action et la dicter. « Ici le verbe se fait chair ou objet, comme le précise Michel Laclos. Que faut-il pour fabriquer un escalier qui servira à s'évader d'une geôle ? C'est simple : des escargots de Bourgogne qui, sur ordre, se mettent « en colimaçon » ! Les huîtres peuvent bâiller par contagion, les pianos se briser si l'on évoque, par leur truchement, l'âme d'un toutou défunt (puisqu'ils sont « à queue » !)... Tout est possible dans le monde de Cami, puisque Cami le veut et que les mots n'ont rien à refuser à un homme qui en fait un usage si joyeux. » Avec Cami, c'est l'irruption d'un second degré qui ne respecte pas grand chose et s'autorise tout : se moquer des morts, des enfants, des institutions, de la religion, des bons sentiments, de la patrie, tout y passe allègrement... ! On pourrait presque voir en lui - comme Allais - un cousin issu de Saint Germain du surréalisme dont certains membres furent des inconditionnels.
Un choix est nécessairement injuste, mais que ces quelques saynètes permettent à d'innocents lecteurs de jouir de l'insolite talent d'un humoriste qui osait tout, c'est parfois à cela qu'on les reconnaît aussi.
« Entre le masque de la tragédie, le masque de la comédie et celui de la grossesse, il faut choisir le moindre : c'est ce que Cami a parfaitement compris en écrivant ses magnifiques contes à dormir debout qu'on peut opposer aux contes à dormir couché, les contes du Lundi par exemple avec lesquels on endort encore aujourd'hui les malheureux enfants dans les maisons bien pensantes. » - Jacques PRÉVERT.
« Cami est le plus grand humoriste "in the world". Ses livres sont des chefs-d'oeuvre d'humour subtil, où le pathétique, la bouffonnerie, le sublime et le grotesque alternent avec une merveilleuse virtuosité » - Charlie CHAPLIN.
Architecte en fuite, le héros de ce premier roman est un bavard qui cause beaucoup de lui-même et de son grand projet : écrire un roman. Et tant pis pour sa femme elle-même auteure un peu en vue. Lui ne sait pas trop comment engager l'affaire mais il a une idée ou plutôt un personnage, plutôt vague : un officier SS pétomane... T ournant, virant, théorisant, il rame sacrément. Jusqu'au jour où, par dépit, il ouvre le journal intime de sa femme et y découvre qu'elle a sans doute un amant, un certain Léon, particulièrement bien monté. Le ton est donné, il ne va avoir de cesse de retrouver l'impétrant pour comprendre l'attrait irrésistible qu'il exerce sur sa compagne.
Désolant d'incertitude mais plein de théories (pas si fumeuses que ça) sur la littérature, le narrateur cause et nous réjouit.
Paru en 1926 dans la revue Weird Tales, La femme du bois était le texte préféré d'Abraham Merritt.
Histoire fantastique et singulière qui mélange réalisme et onirisme débridé, il met en scène un amoureux des arbres qui découvre effaré qu'une famille de bûcherons des Vosges, habitée par une haine ancestrale, veut détruire une forêt. Attiré puis séduit par de sublimes créatures sylvestres, il va se laisser convaincre par elles d'empêcher ce massacre et, comme possédé et hors de lui, affronter les brutes munies de haches.
Fable sombre qu'éclairent des moments de grâce, expression poignante d'une inquiétude face à l'humain ravageur, ce texte légendaire brille d'une étrange et inquiétante lumière. Il mériterait d'être lu par tous ceux qui croient que sauver les forêts relève du combat !
A Nice, au début des années 30, un retraité aisé et mondain hésite entre plusieurs femmes qu'il manipule cyniquement. Il les courtise mais les méprise bien davantage qu'il ne les aime. Tout ainsi est jeu et dissimulation, les vrais sentiments sont masqués et les créatures du roman évoluent dans cette ambiance de fausseté typiquement bovienne.
Mais Un célibataire (1932) est l'un des rares romans de Bove dont les personnages ne sont pas complètement assaillis par l'impuissance d'agir et l'angoisse de la survie. Ils s'abandonnent même par moments aux charmes de la séduction. A la fin, le héros célibataire confie à son ultime visiteuse : « Personne n'est fait pour se comprendre. »
Victor Bâton vit dans l'obsession de se faire des amis. Trentenaire qui tire le diable par la queue mais se refuse à travailler, il subsiste de sa pension et parcourt la ville dans des vêtements usés qui ne le rendent guère séduisant. Pourtant il s'accroche à chaque rencontre, se fait un espoir de chaque regard et n'en finit pas de s'inventer un avenir qu'une magnifique amitié illuminerait. Dans un Paris sans lumières, il nous raconte sa quête en détail.
Avec ce premier roman, Emmanuel Bove ébranla la littérature : son écriture, qui allie densité du style et simplicité formelle, ironie mordante et compassion, a traversé le temps.
Mes amis est un chef-d'oeuvre, de ceux qui touchent chaque lecteur. Une rareté qu'il est indispensable de ne pas manquer. Il a reçu le Prix Initiales 2017
Étrange histoire que celle de ce garçon sans nom, sorte de Gaspard Hauser de Narbonne, gardien de chèvres et souffre-douleur d'une équipe de forains parqués à proximité du Parc Montsouris ! Le sort semble s'être acharné sur lui depuis sa naissance ;
Tous ses frères et soeurs sourds-muets ont été élevés dans une institution, et lui, qui ne l'est pas, y a été envoyé aussi : c'est donc lui le bizarre au milieu des autres. Il n'a qu'un souvenir heureux, celui d'un ami d'enfance. A l'occasion d'une visite de la famille à Paris, il décide de se perdre dans les Catacombes d'où un certain Mirador le cueille pour l'enfermer à son service. Le livre commence quand le garçon devenu homme redécouvre la liberté et avec elle toutes ses illusions. On le prend pour un autre, il va se rebeller, ou presque...
Premier roman d'un auteur qui en aligna une belle série en quarante ans et qui écrit avec toujours autant de fougue et de joie, Mon poing sur la gueule marqua de façon puissante l'irruption sur la scène littéraire d'un franc combattant de la plume. 1880, petit bourg des USA, ennui assuré jusqu'à l'arrivée impromptue dans le saloon d'un gros monsieur bien habillé qui vient faire une proposition singulière :
L'organisation d'un combat de boxe entre deux jeunes Noirs. Le promoteur est noir lui aussi, pas si rassuré que ça mais convaincu que les petits Blancs vont se régaler du spectacle. C'est sans compter sur les ignobles petites mesquineries des vermines du coin qui vont profiter de l'occasion pour transformer l'événement en explosion de violence incontrôlée. Soufflant !
Un tueur en série qui massacre les femmes avec un fer à cheval, un commissaire qui roupille tout le temps, un apprenti détective désoeuvré qui résout l'énigme tout en cherchant son père biologique, une petite ville où boire est le seul remède à la mélancolie, tels sont quelques ingrédients de ce faux polar style Série noire, mais vrai numéro de voltige à la Bartelt qui se lance dans un roman comme un jockey dans un tiercé, avec comme cravache des phrases parfaites et absurdes, des aphorismes hilarants et des décors gris comme une orange. C'est irrésistible quand attend d'un auteur qu'il vous emporte où il veut, et si possible loin de vos pompes, of course... Dans ce petit roman, c'est la quintessence d'un auteur au galop unique, au trot entêtant, au pas cadencé. Un bonheur.
On reconnaît le chevet de l'honnête homme à la présence discrète du dernier Autofictif. Pour peu qu'il les garde tous, l'équilibre est risqué et laisse entrevoir une possible chute. Car nous en sommes désormais à quatorze volumes, de quoi entrer dans les annales de la littérature française. L'avantage, c'est qu'on peut le prendre en cours de route, et sans permis. Bref, enfin démasqué, L'Autofictif nu sous son masque s'annonce comme le plus torride de la série, celui qui en dévoile plus que tous les autres, celui qu'il ne faut pas manquer sous peine de passer à côté d'un univers littéraire en expansion mais unique en son genre.
Cette longue nouvelle écrite en 1926 met en scène un individu à la fois idéaliste et misanthrope qui acquiert à l'âge de 35 ans une île dans l'intention de la transformer et de créer un univers dont il sera le maître.Ses espoirs déçus, il s'installe sur une deuxième île plus petite et sombre peu à peu dans la plus totale indifférence avant de finir hanté par ses obsessions.
L'amour est enfant de bohème, certes, il est parfois parent de folie. Fin connaisseur de ce sujet, Edmond De Amicis, géant de la littérature italienne encore méconnu en France, a composé des romances subtiles, éclairées d'un soleil sombre : elles dépeignent les "bouleversements imprévus" qui guettent ceux que la passion ravage.
Les deux récits inédits présentés dans ce recueil nous transportent dans une petite île de Sicile, prison amoureuse de la belle Carmela folle d'avoir été abandonnée, puis à Séville, cité où le soupçon peut coûter "chair" au plus vibrant des amants.
Histoires fatales, livrets d'opéras dont nous composons la partition, ces petits joyaux parfaitement taillés nous rappellent les pouvoirs vertigineux de l'amour, sans nous priver des plaisirs d'une fin heureuse.
« Vincent Vigneron n'illustre pas, canoniquement, le genre de l'aphorisme. Il le subvertit. » Comme l'annonce Clément Bénech le préfacier de ce recueil qui nous a proposé cet auteur pour le moins singulier, V.V. est un adepte de la forme courte dans laquelle il s'interdit d'être sentencieux, contempteur, dans laquelle il ne joue pas au cynique, au détaché. "Le fragment sied à cet explorateur de formes. Chez lui, chaque aphorisme est une occasion de revêtir un nouveau costume, de moduler sa voix ; chaque fragment, une monade. Un monde en soi, avec ses propres règles, sa propre hiérarchie." C'est de la littérature sous sa forme la plus contractée, peut-être la plus pure, une suite d'éclats, d'épiphanies, des instantanés de drôlerie qu'on ne nous explique pas. C'est simplement unique.
Bien sûr, cela fait des décennies que la littérature nous annonce l'anéantissement de la race humaine, notre capacité à nous détruire ne se discutant plus. Quinzinzinzili fait partie des rares grands romans post-apocalyptiques et étonne toujours par son ironie visionnaire, son pessimisme halluciné et ses trouvailles géniales. Publié en 1935, il a été imaginé par Régis Messac (1893-1945), considéré comme l'un des précurseurs du genre, et nous entraîne après le cataclysme, à la suite du dernier des adultes, témoin stupéfait de la renaissance du genre humain : sous ses yeux désabusés, un groupe d'enfants réinvente une Humanité dont l'Histoire a disparu. Et Messac, qui sait que la Civilisation est mortelle, nous offre le spectacle d'une poignée de gosses en train de lui régler son compte...