Pendant plus d'un siècle, de la IIIe République naissante (1870) à la dernière décolonisation (1980, les Nouvelles-Hébrides), la propagande coloniale a fait partie du quotidien des Français. Affiches touristiques ou de recrutement militaire, expositions universelles et coloniales, manuels scolaires et protège-cahiers, couvertures de livres et de magazines, presse illustrée et brochures de propagande, photographies et cartes postales, jeux de société et bandes dessinées, publicités et films, monuments et statues, peintures et émissions de radio... tous les supports ont participé à cette apologie de la « plus grande France ». Au coeur de l'État, une Agence des colonies a été le fer de lance de cette propagande, et beaucoup ont oublié son action. Génération après génération l'idée coloniale a fait son chemin, pour devenir consensuelle durant l'entre-deux-guerres et se prolonger jusqu'aux dernières heures de l'Algérie française et même au-delà. Au coeur de cette dynamique, l'image a été un vecteur essentiel du message colonial, portant un regard paternaliste et raciste sur ceux que l'on appelait les « indigènes ».
Ce livre analyse, décode et replace dans son contexte cette incroyable production, permettant, en croisant les sources les plus diverses et des archives exceptionnelles, de comprendre les mécanismes de l'adhésion du plus grand nombre à l'Empire. Par un remarquable décryptage des images, accompagné de citations pour chaque époque, ce travail nous montre comment a été construit l'univers symbolique structurant l'imaginaire sur la colonisation. Celui-ci est indissociable de l'identité nationale et a des répercussions sur les grands enjeux politiques, économiques et idéologiques pendant près d'un siècle. Ce livre, écrit à cinq voix, permet de comprendre comment le discours sur la « mission civilisatrice » s'est imposé et comment se sont bâties les grandes mythologies de la « République coloniale », dont certaines représentations perdurent. Cette approche inédite sur notre culture visuelle, politique et historique participe au travail de déconstruction en cours sur l'héritage de la colonisation, nous permettant de regarder autrement ce passé et ses résonances dans le présent.
En 2005, les auteurs de cet ouvrage publiaient La Fracture coloniale, juste avant la révolte dans les banlieues. Dix ans après, l'espoir d'une évolution positive s'est effondré. Dès lors s'est imposée la nécessité de faire le bilan des crises identitaires et sociales qui traversent la France de toute part. Pourquoi ce pays a-t-il plongé dans ce maelström régressif, animé par une pensée néo-réactionnaire se délectant du déclinisme, suscitant la peur devant l'Étranger, l'immigré ou le réfugié, déversant ses imprécations contre l'Europe et la « mondialisation » ? Comment éclairer la montée en puissance inexorable du Front national, ravivant les sentiments nationalistes, la passion de l'entre-soi et de la communauté ethnique ? Pourquoi relève-t-on partout le sentiment d'une urgence au ressourcement identitaire ? Les racines de cette situation postcoloniale n'ont pas changé et aucune leçon n'a été véritablement tirée des événements de 2005.
Bien au contraire. De la faillite de notre modèle d'intégration aux atermoiements de la politique de la Ville ; de l'ethnicisation des territoires aux désastres de la lutte contre les discriminations ; de l'enkystement du chômage dans les quartiers et les outremers à la fragilisation des classes moyennes ; des thèses délirantes sur le « grand remplacement » à la haine de l'Islam ; des crispations communautaires au ressac de l'antisémitisme ; de notre impossibilité d'affronter le passé colonial aux expéditions aventureuses dans nos anciennes colonies, cet ouvrage, réunissant les meilleurs spécialistes sur ces questions, entend faire le bilan des crises et crispations qui obscurcissent tout l'horizon.
Autant d'analyses qui questionnent le renfermement identitaire pour lutter contre les obscurantismes de tout bord.
La France est entrée depuis les années 1990 dans une ère nouvelle : l'immigration et les productions culturelles qui ont émergé des communautés postcoloniales ont produit des structures socioculturelles radicalement nouvelles, interrogeant ainsi l'idée de « francité » et le sens même du mot « nation ». Dans cet ouvrage original à plus d'un titre, Dominic Thomas explore les impacts sur les sociétés et populations africaines de la dissolution partielle des structures d'États-nations modernes en faveur de mécanismes économiques, juridiques et politiques supranationaux.
Pour analyser les bouleversements qui ont résulté de la domination coloniale et postcoloniale, de l'affaiblissement de l'État-nation et de l'émergence de générations de jeunes exclus, l'auteur s'appuie sur une étude comparatiste des oeuvres littéraires d'écrivains africains, français ou antillais. Ce faisant, il donne à voir les circonscriptions transnationales issues du colonialisme et de l'immigration et l'émergence d'une littérature « afro-française », qui rafle les prix littéraires internationaux et fait connaître la langue, plus profondément sans doute que ne le peuvent les institutions de la francophonie. Et en mobilisant les apports de différentes disciplines (anthropologie, sociologie, études francophones, gender studies, études sur les diasporas, études postcoloniales), cet ouvrage permet d'envisager de nouvelles manières de réfléchir sur la dimension symbiotique des relations entre la France et le monde francophone.
Soulignant l'importance pour la société française de valoriser une nouvelle histoire de France qui prendrait en compte la longue histoire des échanges coloniaux et postcoloniaux, ce livre fait clairement comprendre que les diasporas noires se trouvent au coeur de l'ouverture de la France au monde, au coeur même de sa modernité.
Comment est né le concept moderne, scientifique, de "race" ? Pourquoi est-il devenu si rapidement hiérarchique, distinguant les "races inférieures" des "races supérieures" ? Et comment ce concept a-t-il pu revêtir une telle importance, aussi bien au sein de la communauté scientifique qu'auprès du grand public, au cours du XIXe siècle et du début du XXe siècle, jusqu'à être utilisé pour expliquer l'histoire et le devenir de l'humanité ? Autant d'interrogations, à l'origine de ce livre.
L'invention de la race analyse la genèse des conceptions scientifiques de la "race", et montre que les nouvelles techniques de mesure et de représentation des corps racialisés opèrent une révolution visuelle majeure, inscrivant la différence humaine dans la biologie. Cet ouvrage avance qu'à partir d'une origine européenne, l'idée de race s'est étendue - par les connexions transnationales de réseaux scientifiques et marchands -, à tout l'Occident, mais aussi au Japon, à la Corée et à une partie de la Chine.
Partout, elle suscite représentations et politique raciales discriminatoires. L'ouvrage montre aussi que les théories sur les hiérarchies raciales ont influencé les spectacles ethniques (dont les zoos humains), les expositions internationales et coloniales, la photographie ou les collections ethnographiques. Les expositions internationales et coloniales et l'internationalisation des spectacles ethniques ont largement véhiculé ces hiérarchies, contribuant forger une vision du monde fondée sur l'inégalité des races.