Dans cet essai somptueusement illustré, la grande médiéviste italienne Chiara Frugoni observe et analyse minutieusement des tapisseries, des miniatures, des mosaïques, des sculptures, des tableaux et des encyclopédies illustrées pour nous montrer les mille facettes de la tradition séculaire, aussi symbolique que réelle, qui liait les hommes et les animaux. Autant d'images commentées qui rendent vivante et palpitante cette époque lointaine dont a hérité notre culture. Chiara Frugoni nous promène dans le bestiaire imaginaire et quotidien des hommes du Moyen Âge, où la crainte se mêle à la fascination.
François d'Assise mourut le 3 octobre 1226 dans sa ville natale.
Il ne vit jamais la grande basilique qui lui fut consacrée : un cycle de fresques y retrace les épisodes de sa vie. Entrepris dès 1260, cet immense chef-d'oeuvre de l'art médiéval a été réalisé grâce à la contribution des plus grands peintres italiens de l'époque : Cimabue, Giotto, et les Siennois Simone Martini et Pietro Lorenzetti.
Témoignage de foi, dont la haute signification spirituelle est liée à la vie et à l'enseignement du saint patron de l'Italie, la basilique d'Assise est le réceptacle d'un trésor pictural à l'origine d'un renouvellement profond de l'art occidental à l'aube de la Renaissance. Dans ce nouveau livre monumental, somme d'une vie entière de recherche, Chiara Frugoni analyse l'ensemble du patrimoine artistique de cette basilique d'Assise. Cet ouvrage, très abondamment illustré (reproductions partielles des fresques, agrandissements de détails qui passent inaperçus à l'oeil nu), révèle des aspects souvent inédits des vastes cycles picturaux de la basilique. Au fil de la lecture, à travers l'analyse minutieuse de chaque scène, nous découvrons les éléments d'une syntaxe et d'un lexique figuratifs. Chiara Frugoni déchiffre magistralement ce code iconographique et la propagande qui le soustend comme on reconstitue un puzzle, pièce par pièce. Un discours d'autant plus complexe qu'il devait, aux yeux de ses premiers spectateurs, résoudre en images les énigmes et les contradictions de l'Ordre franciscain.
Les étapes de la vie domestique cadencent cet ouvrage. Chiara Frugoni y accorde une place de choix aux enfants et aux femmes, levant bien des mystères sur leurs occupations, leurs joies et leurs peines. Quels objets peuplaient leur quotidien ?
Quelle place était accordée à l'éducation, à l'élévation ?
Le premier chapitre du livre s'ouvre à la faveur d'un lit. Le sommeil et ses usages - les somnambules rodent - ne sont pas les seules fonctions qui lui sont accordées. Symbole de prestige et d'autorité, il sert aussi bien pour l'étude que pour le loisir.
Point de repos pendant la grossesse ;
L'accouchement, dans la douleur, met la femme à rude épreuve. La maternité s'acquiert au prix de nuits trop courtes et en vertu d'une tendre patience.
Après la naissance, il faut assurer la survie du nouveau-né. Ses premiers pas sont hérissés de nombreux obstacles : chiens errants, enlèvement, maladies, abandons, exposent les parents à une perte brutale.
Par la suite, l'éducation de l'enfant, l'apprentissage de la lecture et de l'écriture, nous renseignent sur les méthodes pédagogiques alors employées, néanmoins réservées à une certaine élite sociale. Le travail des enfants demeure épandu, les petits serviteurs circulant dans les logis avec une grâce timide et maladroite.
Les boutons, les binocles, la boussole, l'arbre généalogique, la poudre, à canon ou d'artifice, les cartes, à jouer ou géographique, le Père Noël ou l'université : la vie d'aujourd'hui est faite d'inventions médiévales.
S'agit-il de s'habiller ? Il faut du goût, mais aussi une culotte, des pantalons, et quelques boutons pour fermer le tout !
D'organiser son agenda ? Sans les chiffres arabes et le papier cela serait bien compliqué. S'agit-il de manger ? Sans spaghetti, sans macaroni, sans blé moulu tout court, nos repas seraient tristes. et sales car dépourvus de fourchette. Bref, sans les mille et une découvertes de ces siècles curieusement qualifiés d'obscurs, notre quotidien serait digne du Purgatoire, ou plutôt de l'Enfer, car le Purgatoire est lui aussi né au Moyen Age, de même que le Carnaval.
Dans ces pages au style alerte et à la documentation précise, Chiara Frugoni fait revivre sous un angle inédit la période médiévale.
Les visages du Moyen Âge n'expriment pas les sentiments ni les mouvements intérieurs de l'âme ; ce sont les corps qui parlent.
À sa manière de s'asseoir, selon qu'il se tient les jambes ou s'exprime avec les mains, le condamné nous dit son orgueil ; Ponce Pilate trahit ses doutes ; le pécheur montre qu'il refuse la tentation du démon ; Marie révèle la douleur qui l'accable à la vue de son fils crucifié. Et le célèbre geste des trois doigts levés ne sert pas qu'à bénir : il signifie aussi qu'on détient le pouvoir.
Chiara Frugoni propose un merveilleux voyage à qui veut comprendre le langage des images médiévales. Grâce à ce guide idéal, les sculptures, les mosaïques et les retables redeviennent ce qu'ils étaient à l'origine : des histoires de rencontres, d'émotions et de sentiments.
S'inspirant de deux articles d'Arsenio Frugoni, son père, Chiara Frugoni reconstitue dans ce livre une journée quelconque dans une ville au Moyen Âge. À l'aide de documents précis, fruits d'une prodigieuse érudition, mais surtout d'une iconographie somptueuse, l'historienne raconte par le menu, plutôt qu'elle ne les expose, les différents aspects de la vie urbaine médiévale: de l'artisanat aux superstitions, de la délinquance à la vie en communauté, en passant par toutes les questions que les hommes se posent encore aujourd'hui face à l'au-delà ou, plus prosaïquement, à l'emploi du temps. À la différence d'un documentaire historique, le récit de cette remarquable conteuse nous invite à remonter le temps comme si nous partions en voyage. Le style souple, élégant et d'une très grande précision lexicale de Chiara Frugoni participe au plaisir de la lecture, non moins que l'analyse rigoureuse des fresques et des miniatures qui illustrent son propos. Elle ressuscite un monde disparu tout en démystifiant nombre des stéréotypes qui l'histoire officielle a imposés au fil du temps.