Du siècle des Lumières au Romantisme, de Louis XV à la Restauration, la fête provençale incite l'historien, l'ethnologue, le curieux, à une réflexion sur les rencontres du temps court et du temps long.
Le temps long, c'est celui de la fête traditionnelle, installée de longue date en Provence, épanouie à la fin du XVIIIe siècle. La province méridionale offre les éléments profus d'un système festif complexe. De la fête au village - le "romérage", qui associe au pèlerinage traditionnel des développements profanes nouveaux - aux fêtes urbaines, liturgies religieuses, joyeuses entrées, cortèges officiels, fêtes "folkloriques" avant la lettre, tout un réseau de festivités s'insère dans une tradition plus ou moins ancienne. Mais, dans la seconde partie du siècle, la fête commence à changer : des nouveautés se font jour, alors même que s'élabore, chez les observateurs, un nouveau discours sur la fête.
Les temps sont mûrs pour une autre fête : celle qu'essaiera d'implanter le temps court de la Révolution française. Un autre système se met en place, dont on suit l'évolution, les succès et les échecs. S'agit-il de l'application sans nuances d'un modèle national de la fête révolutionnaire ? Y a-t-il eu des formes d'adaptation, d'acclimatation de la fête révolutionnaire aux réalités préexistantes, ou au contraire rejet ? La fête traditionnelle fusionne-t-elle, disparaît-elle, ou rentre-t-elle dans une clandestinité de fête parallèle ? Autant de questions auxquelles des réponses nuancées, suivant les temps, les lieux et les milieux sont apportées. Comme on s'interroge aussi sur les limites de la "restauration" de la fête traditionnelle après 1815.
L'enquête, menée d'après le dépouillement de près d'un millier de scénarios de fêtes - traditionnelles puis révolutionnaires - s'efforce de donner à une histoire scientifique, qui compte et qui mesure, la place qu'elle mérite, sans enlever à la description concrète l'importance qui lui revient. De nombreuses cartes et graphiques, une iconographie - pour l'essentiel inédite - illustrent le propos.